mercredi 30 novembre 2011

Disquiet



            It’s either the cups of coffee or the swell of electricity in my chest that cause this restlessness, this cold-sweat inability to sit still.  My ankles crack as they move, splintering their somnolence.  « You have your feet on the ground », I am told, but this phrase is a translation.  Somewhere between the indecisive temperature of days and the repeated incantations of songs that guard against too much feeling, the original sentence dissipated; a breath without smoke. 

            Now my cup of coffee is empty, echoing.  A familiar regret ebbs in and out of my mind, a perpetual white noise harmonizing with my anxiety.  This din is deafening, but if I tune it out the silence will be worse.  So the room becomes heavier, the wood of the floor splinters into distorted chords.  Within these atonal walls, even my own humming is distant, as it should be.  Heaped upon the gravitational stillness of the furniture, the mute houseplants and photographs do not move in the wind that cannot enter through the closed window.  Barely perceptible, the only motion in this house comes from faint tones that resound, sotto voce, inside hollow things— pots and pans suspended from the ceiling.  

dimanche 20 novembre 2011

An ideal birthday present...

...in a quantum world













Bach cello suites at the Louvre in July, for you today in November

mercredi 12 octobre 2011

Afin de ne pas l'oublier:



LA TRAHISON DES TIRAGES
 POLICIER



Il était toujours, toujours assis devant un ordinateur.  Informaticien pendant la journée et insomniaque pendant la nuit, Luc n’avait pas souvent l’occasion de bouger ses jambes grêles.  Il respira, un souffle profond d’air frais, parfumé de l’humide automne Parisien.  Il avait toujours aimé cette promenade toute droite, surtout à l’aube, après avoir passé une nuit blanche devant son ordinateur.  Le calme qu’il y trouvait n’existait pas hors de ce chemin de fer abandonné, « la petite ceinture », où il pouvait marcher n’entendant rien sauf le son de ses pas légers, les pas de quelqu’un de mince et prudent.  Luc se frotta les yeux avec ses poings osseux, un effort faible pour bannir l’envie de dormir.  Il y aurait trop de travail à faire aujourd’hui, comme tous les autres jours- et bien sûr, aucune opportunité pour un moment de sommeil, sauf maintenant.  Du travail, mais jamais quelque chose d’important ; rien qui valait de la recognition. 

Bien que tous les habitants du 20e arrondissement connaissent cet endroit, personne n’y allait, à l’exception d’un sans-abri de temps en temps.  Donc, ils le laissaient parfaitement libre pour des balades errantes- celles d’un informaticien solitaire d’un vingtième d’années.  Les feuilles des plantes grimpantes qui dissimulaient le grillage tout autour du chemin de fer commençaient à changer de couleur vers un vermeil profond, piquées par un automne sanguinaire.  Quelques déchets bougeaient avec la brise, basculaient sans aucun bruit.  La lumière du soleil commença à garnir les bâtiments fades du quartier avec les lueurs rosâtres. 

En soupirant, son attention, qui voletait aussi vite entre les réalités du monde vivant qu’entre les fenêtres sur l’écran de son ordinateur, fut tout à coup attirée par un scintillement lointain. À travers ses lunettes brisées, l’image d’un corps apparut.  Il l’approcha lentement, pour voir qui dormait sur son chemin de fer.

C’était une femme d’une trentaine d’années, habillée de jeans noirs serrés et d’une veste en velours côtelé.  Son rouge à lèvres avait subi quelque dommage, et s’était répandu sur le visage.  Ses cheveux noirs froissés voilaient des contusions qui ressemblaient au mascara qui coule.  Il restait encore des traces de rose sur ses joues, mais le reste du corps était en train de devenir froid et bleuâtre.  L’éclat de lumière qui attira l’attention de Luc était venu d’une boucle en argent dans son grand sac à main en faux cuir noir qu’elle serrait encore d’un empoigné lâche.  Elle manquait une chaussure, l’autre partie d’une paire de vieux hauts talons pointus comme des aiguilles.  Les ongles de son pied nu étaient peints avec un moche vernis rouge qui commençait à écailler.

Luc sentit une crainte lourde se déclencher dans son ventre, montant à la gorge.  Un malaise dégoulinait comme une goutte de sueur froide le long de sa colonne, provoquant un frisson.  Il remarqua que cette fille ne vivait plus- son corps était devenu cadavre pendant la nuit.  Tout à coup, il ne se trouva pas à côté d’une femme endormie qui avait trop bu la veille, mais une assassinée.  C’était une situation dont il avait entendu parler dans les actualités, ou bien dans les romans policiers qu’il lisait pendant son adolescence, mais néanmoins une situation sur laquelle il n’envisageait jamais de tomber.  Il réfléchissait, ses pensées éparpillées, ses émotions bouleversées. 

Dans les romans, le personnage qui trouve le cadavre devient toujours enchevêtré dans l’histoire, destiné à être harcelé par les flics, ou encore pire, le meurtrier.  Luc tâtonnait entre les deux possibilités qui se présentèrent : de fuir ou de rester pour faire… quelque chose.  Il ne savait encore ce qu’il pourrait faire- le crime était déjà commis, et il n’était pas le coupable.  Pourtant, une curiosité morbide était piquée par l’apparition soudaine d’un corps dans sa vie comme celle d’un cheveu qui tombe sur la soupe.  Figé sur sa place, le regard fixé sur les yeux fermés du cadavre, Luc considérait ses choix.  Au moins, il pouvait essayer d’identifier la femme pour notifier les flics- quelqu’un devait le faire, il valait mieux que ce soit lui, comme ça l’investigation pourrait commencer plus rapidement.  Peut-être qu’enfin il ferait quelque chose de plus signifiante que réparer un ordinateur. 

Lentement, doucement, il se pencha vers le corps.

Après avoir vérifié qu’il était encore seul sur le chemin de fer, Luc prit son sac d’une main tremblante.  Lançant un autre regard sur le visage abîmé de la femme, il commença à ouvrir le sac, le faux cuir adhéra un peu à sa peau moite.  En fouillant là-dedans, ses mains furent tachées par un bâton de rouge à lèvres sans son couvercle, qu’il remplaça soigneusement dans une des poches à l’intérieur. Il trouva un portable pas cher dont les pièces étaient collées avec du scotch, un reçu pour deux cafés allongés à « Cannibale », et un vieil appareil photo Pentax, dont la plaque arrière était ouverte, laissant exposée la moitié du film.  Il y avait aussi trois stylos à bille, un petit miroir rond, du mascara, et quelques autres accoutrements de maquillage dont il ne savait pas la fonction. Mais pas de portefeuille- pas d’identité.  Il lâcha le sac à côté des genoux du corps.

Déçu, Luc sentit une appréhension montant de ses doigts tachés.  Maintenant ses empreints digitales se trouvaient sur les effets de la femme, et il n’avait pas d’explication.  Il s’essuya les mains sur son jean, répandant le rouge abominable qui devint une faible bavure rose.  Son cœur battit vite, mais son cerveau était paralysé de regret.  Pourquoi, il se demanda, est-ce qu’il s’était imaginé le héros du jour ?  Après tout, il n’était qu’un informaticien.  Qu’est-ce qu’il aurait pu faire pour cette fille malchanceuse ?  Luc s’assit à côté d’elle, prenant encore son sac.  Peut-être, il pensait, qu’il pourrait y trouver un tuyau, une réponse à ses questions.  D’ailleurs, il s’était déjà impliqué dans l’histoire, il n’avait rien à perdre en jetant un autre coup d’œil sur les affaires dans le sac.

Et quel con, il pensa, d’avoir oublié le portable !  Il le chercha parmi les autres choses, se sentant maintenant un peu plus sur de soi.  Enfin il le trouva et essaya de l’allumer.  Rien ne se passait.  Il essaya encore, en appuyant plus fort sur le petit bouton vert—aucun résultat.  Frustré, Luc tenta de l’examiner avec son œil logique et pratique d’informaticien.  Quand quelque chose ne marchait pas dans un ordinateur, c’était toujours au cause d’une raison bête ; quelqu’un qui avait oublié de le brancher, par exemple.  Il tourna le portable dans ses mains, l’inspectant pour des défauts.  Et voilà, c’était quelque chose de bête, car il n’y avait pas de pille.  Luc secoua la tête, déçu à nouveau. 

Néanmoins, il continuait à fouiller, passant par les outils à maquillage variés et mystérieux.  Le reçu pour les deux cafés attira son attention, lui rappelant un lointain mémoire vague d’un rendez-vous avec une jolie fille quelques mois plus tôt.  Les deux avaient pris des cafés, probablement pas allongés, et sûrement pas à un endroit portant un nom aussi bizarre que « Cannibale ».  L’idée des gens qui mangent des gens n’aide pas trop à susciter une relation romantique, ce qui avait été son but avec la fille (qui, il remarquait, n’avait même pas encore lui téléphoné pour proposer de se revoir).  Mais tant pis—sa concentration retourna au sac de la femme devant ses yeux.  Il restait q’un objet à réexaminer.

Il reprit l’appareil photo, faisant attention à ne pas exposer le reste de la pellicule.

C’était la dernière chose qui pouvait lui aider à découvrir l’identité du corps.  Si toute la pellicule n’était pas exposée, s’il y restait encore quelques traces de la lumière qui avait traversé l’objectif et les yeux de cette femme, on aurait de l’évidence témoignant de sa vie.  En plus, Luc connaissait un laboratoire où ils développaient la pellicule pendant une heure ; avant qu’il achetât son appareil numérique, il y avait fréquenté souvent.  Mais quoi faire avec le corps pendant cette heure rapide ?  Luc se sentait presque criminel en décidant de le cacher en dessous d’un pont piétonnier tout près de sa location actuelle.  Il essaya de se persuader de ce qu’il faisait était nécessaire, malgré le savoir que ses actions provenaient d’une soif de recognition, le désir pour une aventure dans sa vie étale. 

Le corps était plus lourd que prévu, mais Luc réussit à le cacher dans l’ombre sous le pont, arrangeant les membres du cadavre pour créer l’illusion de quelqu’un qui dormait.  Prenant l’appareil, il enroula la pellicule pour la protéger, puis il la mit dans une des poches de son manteau usé.  Jetant un dernier regard à la femme en scrutant sa cachette, il tourna et partit pour le laboratoire, traversant le même chemin qu’il avait pris tout à l’heure. 

La ville avait commencé à bouger un petit peu, quelques vielles dames faisaient leurs courses, baguettes dans les poignets comme des lances de joute.  Luc se promenait vite, craignant que tout le monde lui regardait avec un air de soupçon.  Il évitait même les yeux des chiens, qui pouvaient toujours sentir l’odeur rance de la culpabilité.  Tenant la pellicule dans sa main comme une espèce d’amulette protectrice, il palpa nerveusement la lisse surface courbée avec son pouce.  Enfin, il parvint le laboratoire.  Le tintement de la petite cloche à la porte lui choqua, résonnant dans sa tête pendant des seconds qui s’étendaient infiniment dans l’espace de ses pensées. 

- « Hé, bonjour, mon ami!  Il y a longtemps que je ne t’avais pas vu ici !  Que deviens-tu, hein ? »
Guère capable d’entendre la salutation chaleureuse du patron au-dessus des sons perçants de la cloche et ses appréhensions, Luc murmura qu’il allait bien, qu’il avait acheté un appareil numérique, qu’il avait trouvé une pellicule qui traînait chez lui.
- « 35 millimètres, une heure, comme d’habitude ? » demanda le patron, un de ses sourcils épais élevé avec du concerne pour son client, qui était plus blafard qu’était normale, même pour lui.
Luc hocha sa tête.
- « Bon, bah… à tout à l’heure, mon ami ».  Essayant de provoquer un sourire, il ajouta, « Et n’hésite pas à emmener ta copine,  il y a longtemps que je ne l’avait vu non plus».  Il fit un clin d’œil.
Confus, Luc feignit un air amusé, força un sourire, et partit, faisant attention de ne pas paraître étonné par la coup de sonnette à la porte.  Il sentait affolé par toute cette histoire du cadavre, il fallait qu’il prenne une pause.  Peut-être que ça irait mieux après un café.  Somnambulique, Luc marcha vers le sud pour trouver un café sur rue Saint Maur ou Oberkampf, où les conversations faciles des jeunes pourraient soulager un peu son esprit.

            Après une vingtaine de minutes de marche, il croisa un café d’un air chaleureux sur rue Jean-Pierre Timbaud, où beaucoup des jeunes branchés parlants de n’importe quoi sirotaient leurs petites tasses d’express.  Sans regarder ni la carte ni les tarifs affichée à côté de la porte, il entra et s’assit, totalement absorbé par ses pensées.  Pourquoi est-ce que le patron du laboratoire photo lui avait parlé d’une copine ?  Luc était célibataire depuis longtemps, presque une année. 

- « Deux cafés allongés ? » dit le serveur, deux tasses aux mains.  « Oh, excusez-moi, je me suis trompé de table » il ajouta, tournant vers le fond du café en cherchant les justes récipients des boissons. 

Le fil de ses pensées interrompu, Luc commença à tripoter le reçu laissé sur la table par le dernier client.  Il n’avait aucune idée de ce qu’il commanderait, peut-être qu’il prendrait quoi qui soit noté sur le reçu.  En le regardant de près, il remarqua le nom du café- « Cannibale ».  Effrayé par cette coïncidence inquiétante, il se leva brusquement, renversant sa chaise, et alla vite vers la porte.  Il n’entendit pas la remarque d’un serveur à l’autre-
- « C’est bizarre, normalement il est si poli ! »

Luc marchait vite vers le laboratoire sans regardant ses environs.  Il était impatient de voir les images tirées de la pellicule, de trouver une fin de cette aventure épouvantable.  Il arriva au laboratoire quelques minutes avant l’heure prévu, mais la porte était fermée, les lumières éteintes.  Frustré, Luc regardait l’intérieur par les vitrines, cherchant le patron ou au moins une explication pour son absence.
            - « Il n’est pas là », dit le marchand de l’épicerie à côté en approchant.  «  Il a dû aider sa mère qui habite juste au coin.  Il m’a donné une pellicule de délivrer à quelqu’un, c’est à vous ? »
Luc hocha sa tête.
            - « Bon, je pense qu’il m’a dit que ça fait sept euros. »
Luc fouilla dans ses poches pour trouver son portefeuille, dont il procura sept euros de monnaie.  Il remercia le marchand et partit avec un petit sac en plastique contient ce qu’il espérait éclairerait sa situation.  Descendant encore sur le chemin de fer pour voir les tirages sous la protection du pont, il était si distrait par le désir de les examiner qu’il ne remarqua pas que le corps n’était plus là.  Il déchira l’enveloppe brusquement, trouvant que la plupart des images étaient complètement abîmées. 

Pourtant, la dernière était parfaitement claire- c’était une image de la femme meurtrie, où elle se trouvait dans un café, souriant vivement, assise à côté d’un homme qui la tient par la main.  Luc plissa ses yeux, un effort de changer le visage de l’homme dans la photo, qu’il reconnaît très bien, trop bien.  C’était le même visage dont il évitait le regard chaque jour devant le miroir rompu dans sa salle de bain.  





At Night




Deeply lost in the night.









Just as sometimes one lowers one's head to reflect, thus to be utterly lost in the night.  

















All around people are asleep.  It's just play acting, an innocent self-deception, that they sleep in houses, in safe beds, under a safe roof, stretched out or curled up on mattresses, in sheets, under blankets; in reality they have flocked together as they had once upon a time and again later in a deserted region, a camp in the open, a countless number of men, an army, a people, under a cold sky on cold earth, collapsed where once they had stood, forehead pressed on the arm, face to the ground, breathing quietly.









  








And you are watching, are one of the watchmen, you find the next one by brandishing a burning stick from the brushwood pile beside you. 

 Why are you watching? 







 Someone must watch, it is said.  Someone must be there.  



-- Franz Kafka, At Night, translated by Tania and James Stern



lundi 3 octobre 2011

Mókuska



Mókuska, mókuska, felmászott a fára,
Leesett, leesett, eltörött a lába.
Doktor bácsi ne gyógyítsa meg,
Huncut a mókus, újra fára megy.