mardi 15 avril 2014

Cher Fernando,




Parfois je me sens envahie d' une tristesse plus ancienne que moi, la douleur inexplicable d’une fin d’après-midi en été. L'interstice de la poussière et la lumière dorée a toujours suscité au fond de moi une nostalgie infinie pour l’inconnu. C’est la même tristesse des soupirs du vent avant un grand orage, ou voir tomber la dernière feuille crispée en automne. Elle se trouve aussi dans les abîmes de la mer, chez les créatures qui vivent toutes leurs vies sans aucune expérience de lumière. Je peux me dire qu’ils ne sont pas malheureux, mais je me demande s’ils ne sentent pas eux aussi l’envoûtante impossibilité d’un soleil inconnu dans leurs vies obscures.


Mais nous ne vivons pas au fond de la mer. Or, quelquefois, nous vivons, sans le savoir, dans l’abîme de nous-mêmes, enfoncés dans le coin obscur d'une mémoire aiguë de tous les moments vides et perdus. Parmi ces souvenirs-coquillages, nous remarquons que nous sommes remplis, comme eux, des échos de la mer. Ces sons ne sont que leurs propres souvenirs qui vibrent sans cesse dans ces maisons qui les entourent, aussi creuses que les nôtres.




Toujours vôtre,


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